Big Brother m'a tué
Tête vide, yeux vides. Je contemple cette vie pathétique, tournant, retournant ces petits détails inutiles dans tous les sens. Pendant un moment, je crois y voir clair. Fausse alerte, j’y vois que dalle.
Fatigue.
Je
suis crevé de ce monde, de mon minuscule cocon que j’avais pourtant
confectionné avec soin. Doucement molletonné, tranquillement emmailloté… J’en
ai bouffé la chrysalide. Ca fait mal quand on s’en rend compte. Apparence de
drogué anorexique à l’extérieur, obèse à en vomir à l’intérieur à avoir trop
ingurgité mes stupides espoirs de gosse. J’ai pas voulu ça.
Il
était joli mon château de cartes, j’étais pourtant sûr de bien avoir refermé la
porte. Faut croire que le scotch était pas suffisant, j’aurais peut-être dû
opter pour l’épingle à nourrice. Ou alors, c’est à cause de toutes ces
charmantes petites choses que j’affectionnais tant. A croire qu’elles
ramenaient pas que de la gnole dans leurs bagages. Ouaip. En réalité, tout est
de ma faute.
Ma
vieille lampe de chevet éclaire faiblement les traits de mon visage, sa lumière
blafarde atténuée par la poussière accumulée sur l’ampoule. Ce serait facile de
passer un coup de chiffon, mais finalement je la préfère comme ça. Elle reflète
bien mon humeur, accentuant à l’extrême mon teint livide, mes yeux cernés et ma
peau desséchée. Je pourrais sûrement faire concurrence à la mort, mais je m’en
voudrais de la vexer. Surtout maintenant.
Ca
va faire combien de temps au fait ? J’ai oublié. C’est pas non plus très important,
je me fous bien de me rappeler un jour. J’ai perdu le monde extérieur de vue.
Personne ne se souvient de moi. Après tout, ce n’est pas comme si j’avais eu
des amis proches qui auraient pu s’inquiéter. Même mes parents ne sont pas
alarmés de ne plus me voir. Mais je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. J’ai
perdu le fil, pour moi, seul comptait mon petit univers virtuel qui me
paraissait pourtant si vrai et merveilleux, et tellement proche de moi. Plus
fort que Heidi et les Schtroumfs réunis, fallait quand même le faire. Plus de
langue de bois, tout est permis, nous seuls détenons la vérité.
Finalement,
c’était pire. J’ai personne à qui en vouloir à part une bonne centaine de
pseudo sans visages, sans « vrais » visages. On voulait refaire le monde, on pensait
que ceux en dehors de notre petite communauté étaient tous pourris de
l’intérieur, des ordures, des inconscients. On aurait peut-être dû se regarder
dans une glace avant. Une pseudo communauté indépendante et parfaite. On en a
détruit plus d’un, après tout c’est si facile de perdre pied derrière un écran.
On est pas comme les autres, on veut surtout pas être comme les autres, et à la
fin on est pires que les autres. On se dit qu’ici, on peut être qui on veut,
mais à vouloir être parfait à nos yeux, on devient le connard parfait aux yeux
des autres, imbu de lui-même et complètement stupide au fond.
C’est
fini tout ça pour moi. Vous m’aurez bien détruit les gars, même si je vous y
aurais quand même pas mal aidé. On peut se procurer de tout sur Internet, même
de ça, ça ou ça. Demain, nouveau fait divers dans les journaux. Au fond de moi,
ma conscience javellisée me chantonne que mon acte désespéré ne sera pas pour
rien, que je vais peut-être sauver de nombreuses vies en interpellant l’opinion
public.
Comme
des milliers d’autres avant moi.
Un
dernier coup d’œil vers le petit papier posé au pied de mon lit, alors que je
porte ma dernière acquisition à ma tempe. Demain, les inspecteurs auront déjà
un titre tout trouvé à donner aux journalistes. Après tout j’ai toujours eu un
certain goût pour les phrases chocs.
___
J'aurais peut-être pu y passer plus de temps, mais finalement il est un peu
trop tard et mon cerveau n'est peut-être pas dans les meilleures dispositions. Je
suis un peu blasée de tout ce qui m'entoure en ce moment, et fallait que
j'écrive quelque chose, n'importe quoi. J'ai pris le bon ton seulement vers la
fin du passage, et même si j'ai essayé de rattraper un peu le début, vous y
verrez sûrement quelques petites irrégularités. En même temps, je voulais juste
écrire quelque chose, je ne pensais même pas la poster. Et puis finalement...
Si vous avez quelque chose à dire à ce sujet, n'hésitez pas à intervenir. Si
vous trouvez que c'est trop, n'oubliez pas que c'est juste une fiction. Il faut
croire que je voulais juste écrire quelque chose de sombre, avec une personnage
principal légèrement tordu et cynique. Pour le coup, je me demande à quoi il
ressemblerait...
A une prochaine fois, dans une ambiance plus légère peut-être.